Chasseur sachant chasser en zéro déchet

Jessica Bertolacci October 22, 2021

 

Je vois ton sourcil qui se relève et se courbe avec ton front qui plisse en lisant le titre. Plutôt incongru non? Chasse et zéro déchet, quel est le lien, ça semble deux mondes complètement opposés. Pourtant c’est vieux comme le monde, les gens ont chassé en zéro déchet bien plus qu’en chasse « moderne ».

Aujourd’hui, la chasse est considérée comme un loisir de plein air, pour d’autres c’est une manière de se procurer de la viande plus naturelle, ça peut être pour prendre un moment, décrocher et avoir de l’adrénaline ou bien par contrôle des populations, quel qu’il en soit, une grande partie de l’animal est délaissée, pour ne pas dire gaspillée.

Il y a près de 6 millions d’années que les hominidés foulent la planète, des histoires de chasse, il y en a plus que l’on peut imaginer! Pendant la majeure partie de l’histoire de l’humanité, les gens ont chassé pour survivre, lorsqu’on parle de survie, ça signifie aussi préserver notre énergie et nos ressources. Il était fréquent d’avoir faim, de vivre des périodes avec très peu de nourriture à disposition, les dents des crânes humains préhistoriques en témoignent. À cause de ces conditions, nos ancêtres ont redoublé de créativité et d’ingéniosité pour récupérer au maximum chaque partie des animaux qu’ils chassaient.

En premier lieu, la chasse servait à se nourrir, c’est plutôt évident, mais elle servait aussi à se protéger des intempéries, et ce, de plusieurs manières. Le tissage était laborieux, alors qu’avec le cuir ils pouvaient se fabriquer des vêtements, de la corde et des chaussures beaucoup plus rapidement. D’ailleurs, au sein même de l’animal tout s’y trouvait pour gratter la peau, la tanner et les outils en os pour la coudre, tels que les aiguilles et alènes (outils pour percer le cuir). Il y a certains endroits qui utilisaient les peaux pour faire le revêtement de leur hutte. À l’époque des mammouths, même les côtes de ces derniers ont servi d’armatures aux habitations. La fourrure, quant à elle, servait pour les vêtements d’hiver, la doublure des bottes, les couvertures et les tapis pour s’isoler du sol.

La cueillette bénéficiait également de tous les petits trésors qu’offraient les animaux. Des sacs de récoltes pouvaient être fabriqués à partir de la peau ou de la panse, qui avait l’avantage d’avoir déjà la forme d’un sac. Pour déterrer les racines et tubercules, on pouvait se servir d’une houe (genre de pioche) conçue à l’aide d’une omoplate fixée à un bâton.

Les enfants n’étaient pas laissés pour compte, en plus des commodités quotidiennes apportées par tous ces outils, des hochets et bilboquets étaient fabriqués à partir des ergots (ongle derrière la patte du cerf), d’os et de cuir.

La chasse servait aussi à la chasse! De nombreuses parties de l’animal entraient dans la fabrication d’outils et d’armes pour chasser. Avec les os, on pouvait, notamment, faire des pointes de flèche, des hameçons et des couteaux. La résilience des andouillers, bois des cervidés, formés pour résister aux chocs lors des luttes entre mâles, servait à fabriquer des pointes de harpon. Tandis que les tendons des jambes étaient retirés pour fabriquer une corde qui comporte les mêmes propriétés que la corde cirée, elle était utilisée, entre autres, pour maintenir en place les pointes de flèches que l’on pouvait ranger dans un carquois formé à même le cuir d’une patte fixée au sabot. Puisqu’ils étaient zéro déchet, les restes non utilisés servaient à appâter les animaux pour les prochaines journées de chasse, alors finalement il n’y avait rien d’inutilisé!

Quoi qu’il en soit, faire tous ces outils n’est plus un besoin essentiel pour nous, tout est déjà à notre porté, sagement rangé sur des étalages de magasins, mais se pratiquer à en faire pour le plaisir, c’est une manière d’honorer le savoir qui a permis aux hominidés d’être aussi résilients et de faire en sorte que notre espèce soit encore présente aujourd’hui. Puis ça permet d’être un peu plus zéro déchet avec ces animaux qui nous donnent leur vie. Sinon, pourquoi ne pas trouver des utilisations modernes à toutes ces parties? Assoyez-vous, observez les os et je suis convaincue que vous pourrez fabriquer de la déco pour votre maison, des bijoux, crochets, poignées d’armoire et, etc. Il n’y a pas que le crâne qui est esthétique finalement! Par ailleurs, si vous désirez apprendre à tanner une peau de manière traditionnelle, nous donnons une formation le 31 octobre, cette fois au Saguenay.

Jessica Bertolacci

Cet article a été écrit pour le Journal Le Fidor de Saint-Élie-de-Caxton

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