Histoires d'oiseaux
Quand j'étais jeune, ma mère s'était découvert une passion pour l'ornithologie. À cette époque, il y avait une ligne téléphonique où les gens signalaient les oiseaux plus rares pour que les autres ornithologues puissent aller les observer. Alors quand l’envie prenait à ma mère d’aller faire une virée d’observation, elle appelait et écoutait l’enregistrement pour savoir qu’est-ce qu’il y avait d’intéressant à aller observer et hop, on partait tels des chercheurs d’or à la recherche d’une nouvelle espèce à découvrir. De l’Estrie à la Gaspésie, en passant par la Mauricie, on ratissait le Québec avec nos jumelles et nos sacs à dos remplis de collations et de livres d’identifications. Mon frère avait même manqué une semaine d’école primaire pour aller à Pointe Pelée sur le Lac Erié en Ontario!
Nous étions banlieusards et l’observation d’oiseaux était notre échappatoire, ça m’a appris à connaître un peu plus la forêt, à connecter avec ce qu’il y avait autour de moi et surtout, à vouloir protéger la nature. Je me souviens qu’il y avait un petit boisé dans ma ville, petit, mais rempli de faune, les gestionnaires avaient prévu y faire du « ménage »… Je déteste cette expression, comme si la forêt ne pouvait pas se gérer elle-même, elle se gérait toute seule avant et s’en sortait très bien sans nous, pour ne pas dire mieux… Alors toujours est-il qu’ils avaient « taggué » tous les arbres à retirer, c’étaient des arbres morts couchés et debouts. Ils étaient morts qu’est-ce que ça change me demanderez-vous? Les arbres morts recèlent d’insectes, ils sont de vrais garde-manger pour les oiseaux, ceux qui sont couchés servent de cachette pour les petits animaux, puis ceux debout en plus d’héberger les insectes, font de superbes condos à oiseaux de toutes sortes et à écureuils. Sachant cela, il n’en fallait pas plus pour que du haut de mes 10-12 ans je parte en mission protection de la forêt! Ha ha! J’y suis allée et j’ai retiré tous les « tags » que je voyais, j’étais fière de mon devoir accompli!
Ma mère, on pourrait la nommer la femme aux oiseaux, elle a tellement de mangeoires d’oiseaux chez elle qu’en plus de faire son épicerie, elle doit faire une épicerie supplémentaire pour ses amis ailés! Ha ha ha! C’était déjà comme ça à l’époque, alors ça attirait beaucoup d’oiseaux et parfois de grands voyageurs, dont une Tourterelle rieuse et un jour un Dickcissel d’Amérique. Il arrivait de loin celui-là, allez savoir ce qui lui avait pris de monter tant au Nord, c’était un précurseur probablement, parce qu’aujourd’hui ses confrères l’ont suivi. Comme à l’époque il était le seul, ma mère avait appelé pour le signaler. Pendant des semaines, des hordes d’ornithologues se sont installées devant ma maison, jumelle à la main, comme des voyeurs sans pudeur. Les voisins ont dû se demander qu’est-ce qui se passait! C’était l’hiver, ma mère était même sortie quelques fois offrir un breuvage chaud pour réchauffer les observateurs.
Découvrir de nouvelles espèces m’a permis de faire un peu plus partie de la forêt, de ne pas juste être une aveugle illettrée de la nature. En sachant qui s’y trouve, quelles sont ses habitudes, en les voyant agir et en apprenant plus sur le caractère de chaque individu, c’est un énorme livre d’histoire qui s’ouvre à moi. Soudain, l’oiseau rouge n’est plus qu’un simple oiseau rouge, c’est un Cardinal rouge, le petit oiseau brun par terre que personne ne remarque, n’est plus juste un petit oiseau brun ordinaire, c’est un Bruant familier avec son partenaire. Ce n’est plus juste des noms d’oiseaux à cocher sur une liste, c’est un bruant insécure qui passe son temps à dire à l’autre « Es-tu là? », « Oui, j’suis là », « Es-tu encore là? », « Ben oui, j’suis encore là ». Le Geai bleu, ce n’est plus juste l’emblème d’une équipe de Baseball, c’est l’oiseau attentionné qui donne une « peanut » à sa douce. Quand on prend le temps d’observer et d’apprendre, on passe d’une impression de ne jamais rien voir en forêt à un émerveillement de voir tout se qui se passe autour de nous!
Ces temps-ci je croise des Chouettes rayées, toi, qu'est-ce que tu croises? En as-tu des histoires d'oiseaux?
Pour en savoir un peu plus sur l'ornithologie, voici un vidéo intéressant!
